Pierre-Alain Mannoni à Nice, en 2017. Crédit : InfoMigrants
Pierre-Alain Mannoni à Nice, en 2017. Crédit : InfoMigrants

Après plus de trois ans de bataille judiciaire, l'enseignant niçois, Pierre-Alain Mannoni, accusé d'avoir transporté des migrantes érythréennes près de la frontière franco-italienne en 2016 sera jugé par la cour d’appel de Lyon le 15 janvier. Celui qui risque 5 ans d’emprisonnement a lancé un appel aux dons pour payer ses frais de justice.

Depuis plus de trois ans, Pierre-Alain Mannoni, un enseignant-chercheur de l'université de Nice Sophia Antipolis, se bat en justice. Accusé d’aide au séjour et à la circulation d’étrangers en situation irrégulière, il sera jugé, une nouvelle fois, devant la cour d’appel de Lyon le 15 janvier. Il est poursuivi pour avoir transporté, en 2016 dans la vallée de la Roya près de la frontière avec l’Italie, trois jeunes migrantes érythréennes, qui étaient ‘blessées après 10 heures de marche’, jusqu’à son domicile de Nice. Pour ces faits, il risque jusqu'à cinq ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende.

‘C’est là où j’en suis maintenant : trois ans et demi pour savoir s’il est légal de secourir des gens en détresse !’, s’est offusqué l'intéressé sur la page d’une cagnotte en ligne lancée par ses soins sur la plateforme GoFundMe. L’argent collecté lui servira, dit-il, à s’acquitter des frais de justice, alors qu’il est étranglé par le coût financier de ce combat de longue haleine devant les tribunaux. En quelques jours la somme qu’il espérait atteindre - 10 000 euros - a été dépassée. 

Déjà condamné en 2017 par le tribunal d’Aix-en-Provence à deux mois de prison avec sursis, le quadragénaire avait finalement vu sa peine annulée en décembre 2018 par la Cour de cassation, qui avait invoqué le principe de fraternité et avait ordonné un nouveau jugement devant la cour d’appel de Lyon.

"C’est un long parcours, mais je ne lâcherai pas…"

Dans une vidéo postée sur Internet, l’homme, qui se défend d’être un militant, rappelle les circonstances qui l’ont poussé à venir en aide aux jeunes femmes érythréennes, assurant qu’il s’agissait de quelque chose de naturel. ‘C’était l’hiver, c'était la nuit, il faisait froid. Et elles, elles étaient blessées : l’une était lourdement blessée au genou, elle boitait avec douleur, l’autre était brûlée à la main. Je n’avais pas prévu de recueillir des gens mais il n’y avait rien d’autre à faire que les secourir. Je ne pouvais pas les laisser la.’ Peu après les avoir recueillies, il s'était fait arrêter par la police à un péage autoroutier.

Face au succès de sa cagnotte, Pierre-Alain Mannoni s’est par ailleurs fendu d’un message sur la plateforme en ligne, se disant porté par tous ces soutiens. ‘Je ne veux plus simplement me défendre, je veux aussi que ceux qui me poursuivent assument leur positions et leur responsabilités, car l’horreur qui existe en France et ailleurs n’est pas acceptable’, écrit-il. ‘En cas de condamnation à Lyon, j’irais à nouveau en Cassation pour ensuite accéder à la cour européenne des Droits de l’Homme. C’est un long parcours, mais je ne lâcherai pas…’

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Le cas de Pierre-Alain Mannoni est similaire à celui de Cédric Herrou, l’agriculteur militant de la vallée de la Roya. Ce dernier est, lui aussi, en attente d’un nouveau jugement devant la cour d’appel de Lyon à une date encore non fixée. Il avait été condamné à une amende par le tribunal correctionnel de Nice en mars 2017 pour avoir apporté de l'aide à des migrants et sa peine avait été alourdie en appel à Aix-en-Provence en août 2017. Ses avocats avaient ensuite saisi la Cour de cassation, obtenant une décision historique du Conseil constitutionnel validant le principe de fraternité.

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